Me voilà de retour de Göteborg en Suède où se déroulait le championnat d’Europe 3D. De retour depuis bientôt 2 semaines me direz-vous, mais il fallait bien que mon corps se venge avec 2 ou 3 bactéries avant que j’arrive à vous écrire.
Comme j’ai pu l’écrire dans mon article sur le championnat de France, cette sélection était, certes l’objectif de la saison, mais surtout, elle était inespérée au vu de l’année compliquée que j’ai pu passer.
En Suède, je ne devais donc pas oublier tout ce par quoi j’étais passée cette année et je devais accepter de faire le mieux que je pouvais avec les moyens du moment. Et surtout, comme au France, l’objectif premier était de me faire plaisir, m’amuser, sourire, et être fière de chacune de mes flèches. Et ensuite, advienne que pourra.
Me voilà donc partie pour Göteborg, avec doudounes, sous pulls à gogo et imperméables : il ne manquait que les moufles. Parce que le temps annoncé était bien loin des 30 degrés que j’avais pu avoir en France avant de partir. Bref, direction la Suède, accompagnée d’une nouvelle équipe, au top, comme on les aime. Pleine de personnalités bien différentes, et pourtant toutes soudées autour d’un même objectif : donner le meilleur à ce championnat, s’éclater, se soutenir, vivre l’équipe. Un bon état d’esprit donc et une belle entente entre nous : une expérience humaine toujours géniale à vivre.
Mais revenons à nos moutons (même si on n’en a pas tiré). Le championnat se déroulait autour du château de Kungälv : le cadre était tout simplement magnifique. Surtout sous un ciel bleu. Même si on a eu la joie de découvrir le terrain sous tous les temps (enfin presque). Bref, c’est vraiment très beau, mais c’est surtout très venteux. Surtout sur les collines à l’arrière du château, sur lesquelles j’ai eu la « joie » de tirer mes 2 parcours de qualification. Certaines parties du parcours sont plus ou moins protégées : c’est le moment d’enquiller les points un maximum. Je démarre au top. Je suis bien dans mon tir, dans mes estimations. C’est propre, ça rentre. Mais à mi-parcours du 1er jour, j’entre sur la phase venteuse. C’est dur. Mentalement, il ne faut pas lâcher, mais le bras ballote d’une part et d’autre de la cible : droite-gauche, gauche-droite… ça n’en finit plus. Alors je retiens ma flèche. Je recommence. Une fois, 2 fois… Sur une cible, 2 cibles… Bref c’est épuisant. Le vent est à décorner les bœufs. Je dois parfois enlever ma casquette pour ne pas qu’elle s’envole pendant le tir et ne pas me faire déconcentrée davantage. Comme toutes les autres, j’attends l’accalmie (raisonnablement). Et puis, je me décide, je lâche enfin la flèche, et le vent reprend pendant le vol, et je vois doucement les flèches déviées, déviées… Moralement, c’est vraiment dur. Je sais que je les tire bien, que c’est propre. Sans vent, j’étais bien dans mon tir, c’était fluide et ça faisait plaisir. Parce que malgré les galères de ces derniers mois, les sensations étaient là. Mais dans le vent, je subis. Je subis dans la visée, certes, mais surtout je subis en regardant mes flèches se faire pousser, indéniablement en dehors de la zone que je cherche à atteindre. Je subis, et j’ai beau me dire que le tir est propre, que le mental est bon, la confiance s’égrène au fur et à mesure que le vent me pousse.
A la fin de ces 2 jours, je suis 14ème. C’est bien, me direz-vous : je suis dans les 22 premières. Je vais pouvoir jouer les duels et surtout, il y a 14 autres concurrentes derrières moi qui aimeraient être à ma place parce que, pour elles, la compétition s’arrête là. Mais le mercredi soir, la confiance n’est pas au rendez-vous. Je sais que je suis capable, que je sais faire les choses, mais je sais aussi que demain, il y aura du vent, et que mes flèches ne l’aimeront toujours pas. Alors je me force à oublier ce contexte. Je dois passer outre tout ça. Et le jouer au mental. Comme je sais le faire. Je suis capable et c’est bien ça l’essentiel. Les autres aussi peuvent pâtir du vent, je ne suis pas la seule. Et je peux faire les flèches qui feront la différence.
Les duels se passent sur 9 cibles en descente, dans les mêmes pentes que j’ai pu tirer les jours précédents : en plein vent donc. Il fallait s’y attendre. Mais surtout, tous les duels se passent sur les mêmes cibles. Cela signifie que la concurrente que je vais rencontrer aura déjà tirer entre 3 à 6 cibles que nous allons tirer dans notre duel. Ce n’est pas juste ! C’est dur à digérer mais il faut oublier ces paramètres et faire le job. Parce que, quels que soient les aléas et le contexte, c’est à moi de faire le job et il n’y a que moi pour le faire. C’est parti. Avec le vent, je prends déjà quelques points de retard. Je lâche une flèche « au vol », dans la bourrasque de peur de dépasser le chrono, et perd des points cruciaux. Mais ce n’est pas fini. Je sais que jusqu’à la dernière flèche, tout peut arriver. J’aborde la dernière avec la niak. J’ai 4 points de retard mais c’est un ours, debout, loin, et dans le vent. Je suis capable de faire un 10 et elle peut faire un 5 d’estimation. J’y vais à fond. J’y crois. Le tir est fluide, je suis bien, le vent s’est calmé… Sur le pas de tir, du moins. Ma flèche part, et comme les autres, je la vois dérivée… Elle se plante en 5 latéral, pile poil à la hauteur du 11. La sienne était 5 (mauvaise estimation). J’avais raison d’y croire. Mais encore une fois, le vent ne m’aura laissé aucune chance. C’est dur. Dur, parce que, là encore, j’ai subi. Dur parce que je n’ai pas mal tiré. Cela aura au moins eu l’avantage de me montrer à quel point mes flèches ne sont pas adaptées. Bref, j’encaisse le coup sur le moment, mais globalement je digère vite. Il y a quelques points à bosser et du matos à changer et je pourrais repartir à l’attaque.
C’est donc fini pour moi, mais ce n’est pas fini pour les autres. Je file encourager Elodie, puis Laurianne (tous les duels se déroulent en même temps et nous suivons les autres par What’sApp). C’est génial à suivre. Chaque archer a des besoins différents dans la manière d’être supporté et on se donne à cœur joie d’être là pour eux, quitte à danser « Mamma mia » entre 2 cibles pour que Laurianne garde son sourire et continue à nous faire rêver sur ses duels. Malheureusement, ce jeudi-là, nous faisons les frais de ce nouveau mode d’élimination en duel et nous perdons beaucoup d’individuels. Mais on ne baisse pas les bras. Nous allons retrouver Christine et David en demi-finale et nous avons encore les équipes dans la course. On n’a pas donc fini de donner de la voix, tous ensemble. Alors non, cette année, nous n’aurons pas la joie d’entendre la marseillaise (autre que dans le bus qui nous emmène sur le terrain) mais nous avons tout de même vécu des supers moments avec nos demi-finalistes, qu’ils soient finalement médaillés ou non. Suivre des duels, c’est top. Pouvoir les suivre jusqu’au carré final, c’est autre chose. Alors un grand bravo à David et à Christine et bravo à nos 2 équipes : vous nous avez tous fait rêver.
Un grand merci à tous ceux qui m’ont suivie et encouragée, même de loin, pendant ces championnats. A mes sponsors qui me soutiennent pour aller jusque-là : Arc Système et Lyon Archerie. Aux flèches légendaires, toujours là derrière moi. Un énorme merci à Eric pour ses « coups de pieds au cul » et son sac à sourire (littéralement) que j’ai pu découvrir au fur et à mesure des parcours, et qui m’a fait prendre des fous rires toute seule sur le terrain. Un énorme merci aussi à ma Maman pour avoir pris l’avion pour me suivre en Suède et partager cette belle expérience avec moi (même si elle a dû sécher quelques larmes aussi). Merci à tous les supporters qui ont fait le déplacement et à Nico qui n’a pas pu le faire mais sans qui, je n’aurais pas découvert ce petit bout de Suède, ni vécu cette belle aventure.
Maintenant, c’est l’heure de faire une pause pour revenir en pleine forme et gonflée à bloc pour un nouvel objectif : le championnat du monde 3D 2019 à Lac Biche, au Canada.
Aurore
(Crédit photo : FXD Photographie, Thierry Baret, Fredrik Gidensköld)